Mes Vœux pour 2025

Bonne Année - "Joy to the World" by Lindsay Stirling

Vous rendez-vous compte que nous sommes déjà au quart du 21 ème siècle ?! C'est fou, non ? J'espère que vous avez tourné la page 20...

24 avril, 2024

El Zorro Negro - Ti Pouchon

L'Histoire et la Culture, la musique notamment, sont souvent intimement mêlées.
C'est vrai que j'y reviens souvent mais au fil de mes recherches force m'est de constater que très souvent l'une influe sur les autres. Et inversement.

K-pop, J-pop, jazz ou "chanté Nwel" de nos Antilles, ces musiques sont les enfants de l'Histoire.

Faute d'avoir les projecteurs braqués sur elles, faute de curiosité, on oublie parfois les deux.
Ainsi en va-t-il de la musique haïtienne ou musique racine.

 

Je suis presque sûre que, tout comme moi, vous vous êtes rarement posé la question du "pourquoi" en écoutant parler un Haïtien, il parlait français, non ?
De même que le fait que les patronymes sonnent furieusement français, le créole haïtien ne suscite pas plus de curiosité que ça.

Haïti, deux siècles d'instabilité et d'amnésie

Pour les plus anciens d'entre nous, Haïti c'est la dictature sauvage des Duvalier et de leurs "tontons macoutes" qui firent régner la terreur et provoquèrent une vague migratoire vers les îles voisines ou la France.
Aujourd'hui, ce pays qui a le triste privilège de figurer dans le tableau de tête des 45 PMA (Pays les Moins Avancés du Monde) est plongé dans le chaos d'une guerre de gangs sanglante.

L'Histoire mise sous le boisseau

J'ignore ce qu'il en est aujourd'hui mais "de mon temps" les manuels d'histoire semblaient avoir oublié cette ancienne colonie française qui fit la fortune de grands noms de villes comme Nantes, La Rochelle ou encore Bordeaux qui bâtirent cette fortune au pris du sang des esclaves, bien après l'indépendance de l'île.

L'Histoire des Grandes Antilles est pour le moins remuante !

William Corden the_Elder-Charles_X

Cette colonie, considérée comme "la plus riche du monde" attise toutes les convoitises, espagnoles, anglaises et françaises. Tout ce petit monde se castagne allègrement pour établir sa domination, sans parler des Américains qui à partir de 1914 apporteront leur contribution au bordel ambiant !

Finalement Haïti tombe sous la domination française, et ça ne sera pas un long fleuve tranquille !

Le jeune Premier Consul Napoléon Bonaparte, futur Napoléon 1er, se fera copieusement botté le cul par l'armée d'esclaves noirs haïtiens lors de l'Expédition de Saint Domingue (1802/1803).

En 1804 Haïti devient la première république à majorité noire et le deuxième état indépendant du continent américain après les États-Unis.

Et devinez qui n'est pas content ?

Les planteurs et grands négociants français, dont certains se sont exilés en Louisiane, hurlent au charron devant le manque à gagner et les pertes subies.

Une indépendance très chèrement acquise

La France tentera vainement de faire revenir la République d'Haïti dans le giron de la colonisation heureuse,  mais en vain.
En 1825, le roi Charles X concède l'indépendance de la jeune république, mais à quel prix !

Le 17 avril 1825 le roi Charles X signe une ordonnance qui pèsera lourd dans le futur d'Haïti... et peut-être sur notre déficit budgétaire actuel.
En effet, s'il reconnait cette indépendance du bout de la plume, sous la pressions des colons il impose des "réparations" à hauteur de 150 millions de francs or.

Les Haïtiens mettront 122 ans à payer cette dette (1947), sans compter les intérêts y afférant qui ne seront finis de rembourser qu'en 1952.

Si Sarkozy en 2010, puis Hollande en 2015 reconnaissaient une dette "morale" de la France, en ce mois d'avril c'est silence radio tant du ministre des Affaires étrangères que de son patron, Emmanuel Macron, tandis que ce 18 avril à Genève, Volker Turk, Haut-commissaire des Nations unies aux droits de l'Homme, soutenait la demande d'une vingtaine d'ONG pour que la France rembourse cette rançon à la République d'Haïti, quitte à passer par la constitution d'un tribunal à l'ONU.

On parle d'un chiffre minimal de 21 milliards de dollars (env. 19,6 milliards d'€) et de près de 200 milliards (env. 186,6 milliards d'€) si on inclut les intérêts.

Pour les Haïtiens, il y a urgence.

Une culture musicale au fil de l'Histoire

C'est un paradoxe dans la vie des peuples et des nations : de leur Histoire troublée nait le plus souvent un foisonnement culturel qui représente une richesse immatérielle.
La musique haïtienne n'échappe pas à cette règle.
Musique sous influences

A l'instar de leurs frères de chaînes aux États Unis, dans l'archipel caribéen ou encore au Brésil, les musiciens haïtiens ont à cœur de préserver leur héritage africain.

Eux aussi y mêleront les influences musicales de ceux qui furent leurs "maîtres" mais également des influences vaudou très marquées, des influences religieuses ou encore classique.
Il est à noter que la musique haïtienne s'est enrichie de courants divers qui se sont développés en fonctions des crises politiques et sociales du pays, comme autant de jalons dans l'Histoire de l'île.

De façon très schématique, on peut considérer qu'il existe deux courants : celui "du sol", endémique à l'île, et celui que j'appellerais "expat", qui est celui des migrants haïtiens qui ajoutent à leur musique les sonorités de leurs pays d'accueil.

C'est à cette deuxième catégorie qu'appartient Franklin Medina.


 El Zorro negro entre Haïti kreyol et bachata

Je n'ai malheureusement pas trouvé d'informations précises et fiables sur la biographie et le parcours artistique de Franklin Medina "El Zorro Negro".
J'espère pouvoir réparer cela ultérieurement.

Inscrite en 2019 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l'UNESCO, la bachata est à la fois une musique et une danse représentatives de la culture populaire de la République Dominicaine.

Plutôt mal vue par la bonne société dominicaine, la bachata est la musique des classes défavorisées des barrios (bidonvilles) et des plantations.
Elle mêle bolero, merengue, compas haïtien et rythmes africains.

Au fil des secousses politiques et séismiques qui ont secoué leur pays, les immigrants haïtiens ont fusionné les deux musiques, apportant un son nouveau.
Bien qu'ayant contribué au renouveau du genre et à sa popularisation dans le monde (notamment en Afrique), les bachateros haïtiens enregistrent leurs disques en espagnol, même s'ils composent en kreyol. Si on en croit le label iASO Records, à ce jour aucun disque de bachata n'a été enregistré en créole haïtien, par crainte de persécutions de la part des Dominicains opposés à l'accueil des Haïtiens sur leur sol.

La musique adoucit les mœurs, mais apparemment ça prend du temps.

 


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