17 juin, 2020

Ferrat chante Aragon


Être "vieux" présente à la fois des inconvénients mais aussi quelques avantages non négligeables et même si les jeunes nous regardent avec condescendance, c'est avec grand plaisir que nous leur laisserons leur époque qui ne nous donne pas du tout l'envie d'avoir leur âge !

Les inconvénients, tout le monde les connait ou les imagine ; physiquement il est clair qu'on se rouille un peu.
Parmi les avantages, outre celui de pouvoir prendre le temps de vivre  ce qu'il nous reste à vivre, il y a la transmission de la mémoire.
Mémoire historique d'une part mais aussi mémoire culturelle d'autre part et là, sans vouloir être méchante, y a du taff  !

Décérébrés par l'inculture Tiktok, toute une frange de la jeunesse a oublié voire ignorent des pans  entiers de la culture du XXème siècle.

Que reste-t-il d'Aragon aujourd'hui ?

Aragon et Ferrat : les artistes rouges

Soyons honnêtes, pour ma génération qui l'étudia un peu au lycée comme pour celle qui suivit il reste peu de chose d'Aragon comparativement à son œuvre.

Louis Aragon -décembre 1936

Aragon appartient à ces artistes qui, au nom d'un humanisme sincère, prirent fait et cause  pour le tout jeune régime communiste de l'URSS.

Persuadés d'œuvrer pour un monde meilleur, ils mirent leur talent et leur notoriété au service de ce futur monde, plus égal, plus juste et plus libre. Fut-ce de l'aveuglement, de l'ignorance, ou un peu des deux ? Ce fut probablement tout en même temps et leur attachement fut tel qu'inconsciemment, ils se placèrent dans la ligne de Moscou.

Aragon y compris, comme je le rappelais dans l'article consacré aux martyrs de l'Affiche Rouge.
Il n'en reste pas moins un des grands poètes français.  

Ferrat : et le verbe se fit chant

Aragon n'a jamais mis sa plume au service de la chanson, et il n'est nullement certain qu'il l'ait jamais souhaité.
D'aucuns affirment même que si certains chanteurs se sont emparé de ses textes, ce fut à son corps défendant.

Il fit une exception pour un jeune artiste qui, en 1965, traversait une mauvaise passe, un dénommé Jean Ferrat. Aragon nourrissait une certaine tendresse pour le jeune  homme, pour le fervent militant, pour le poète mais aussi pour l'homme. Aussi accepta-t-il que Jean Ferrat mette en musique  et enregistre son fameux poème Les Yeux d'Elsa.
La chanson est un succès et indirectement le poète a sorti le chanteur de la mouise.

Si Aragon en tant qu'homme suscita de nombreuses polémiques pour son soutien au régime soviétique, le poème est reconnu par tous, y compris par Georges Brassens qui ne nourrissait aucune sympathie pour la gauche.


Sorti en 1971, l'album "Ferrat chante Aragon" est la compilation des poèmes que Ferrat a mis en musique et qui parurent sur des albums précédents à laquelle il rajoutera Le Malheur d'Aimer.
La réédition CD (1992) s'enrichira du désormais culte Aimer à perdre la Raison et Les Lilas.

Que resterait-il d'Aragon aujourd'hui ?

Pour le grand public, sans ce superbe album, probablement pas grand' chose d'autre que des poèmes appris à l'école et aussi vite oubliés.

 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire