Marilyn Monroe - Une voix à Hollywood

Le mythe absolu, le fantasme de générations entières de mâles et de femmes aussi, la star dans sa plus pure définition : Marilyn Monroe.

De Norma Jean Baker à Marilyn Monroe, la vie de la star n'est en fait qu'une énorme supercherie orchestrée et mise en place par le système macho hollywoodien.
Norma Jean veut fuir une jeunesse difficile entre une mère schizophrène et un manque de père en accédant au rêve américain.
Hollywood va l'offrir à la pin-up de calendrier, bien foutue mais assez quelconque, et plus encore jusqu'au cauchemar absolu.

Monroe joue, Marilyn chante

Pour dire les choses comme je les pense, la "fabrique" hollywoodienne a créé un "produit" sexuellement bankable dont il faut bien admettre la perfection.
Supercherie physique, résultat de la chirurgie esthétique et de près de trois heures de maquillage, mais aussi supercherie quant à l'image d'un personnage, dépouillé de tout ce qu'elle était vraiment.

Tant pis pour l'actrice à qui on confie essentiellement des rôles d'idiote un peu naïve. On ne lui demande pas d'avoir du talent mais d'incendier l'écran et le public. Ce dernier la classera longtemps dans la catégorie des femmes "ravissantes idiotes".

Passionnée de littérature, elle a l'esprit vif et un humour qui séduira (spirituellement parlant) l'écrivain Truman Capote qui consacrera une nouvelle, A beautiful child (1980), à leurs joutes oratoires.

Dans sa bibliothèque romanciers contemporains américains côtoient de grands classiques européens. Elle lit Faulkner, Tolstoï, Flaubert, Dostoïevski...

Quand Marilyn Monroe demande à jouer le personnage de Grouchenka, femme qui affronte ceux qui l'ont humiliée dans sa jeunesse, dans "Les frères Karamazov" de Dostoïevski, on lui rit carrément au nez.
Il faudra attendre son ultime film, The Misfits (Les Désaxés), pour découvrir quelle formidable actrice elle était.

Quand Marilyn donnait de la voix

Marilyn chante pour les GI (Corée 1954)

Mais il est un autre talent de Marilyn qui est souvent oublié, son talent de chanteuse. 

Dans la mémoire collective, quand on évoque Marilyn chantant, c'est l'image d'une Marilyn Monroe en robe couleur chair hyper sexy et susurrant "Happy birthday Mister President" à JFK.
On lui colle la voix qui va avec le personnage, fluette et un peu acide.Décidément, on ne lui aura pas épargné grand' chose !

Pourtant dès le premier titre de sa carrière, on est surpris par une voix de crooner très loin de la voix mièvre de I Wanna be Loved by You.

C'est dans le film "Les reines du music-hall" (Every babby needs a Da-Da Daddy) qu'on découvre qu'elle sait vraiment chanter.
Puis ce sera Kiss dans le film "Niagara" en mode sensuel et romantique.

C'est le film "Les Hommes Préfèrent les Blondes" qui assoira son statut de chanteuse de music-hall auprès du public.
Unique comédie musicale tournée par Howard Hawks ce dernier l'avait taillée "sur mesure" pour un autre sex symbol, la pulpeuse Jane Russell. Vraie star du film (son cachet était 10 fois supérieur à celui de Marilyn), elle forme un duo explosif avec son amie. La blonde lui vole la vedette et la chanson Diamonds are a Girl best Friends devient un tube, dans une mise en scène devenue iconique.

 Signée par Jule Styne et Leo Robin, Diamonds... avait été interprétée pour la première fois à Broadway par la chanteuse Carol Channing, version totalement éclipsée par celle du film.

Autre film marquant pour Marilyn Monroe chanteuse, Certains l'aiment chaud, où dans la peau de Sugar elle interprète I Wanna Be Loved by You, Runnin' Wild ou Some like it Hot.
Ce dernier titre sera aussi le titre du seul album que l'actrice sortira de son vivant.

Que ce soit dans le registre de la romance (One Silver Dollar et The River of no Return dans le film éponyme), dans le registre music-hall ou un registre plus swing, Marilyn Monroe a une voix mais aussi une sensibilité d'interprète.
En 1954 elle affronte l'épreuve imparable pour un chanteur, la scène live, pour un tour de chant en Corée afin de soutenir le moral des "boys".

J.R. Eyerman LIFE collection

Sa maîtrise du chant (et celle de la comédie) ne doit rien au hasard.

En 1949 (22 ans), alors inconnue, elle travaille son chant sous la houlette de Phil Moore, jazz man pianiste et chef d'orchestre qui formera également Ava Gardner et qui soutiendra le jeune Frank Sinatra. On lui doit également la B.O. du film Dumbo de Walt Disney entre autres, même s'il ne fut pas crédité probablement pour des questions raciales.

Militante féministe et anti raciste, elle voue une grande admiration à Ella Fitzgerald dont elle devient une indéfectible amie.
Elle chantera, entre autres, avec Nat King Cole et Miles Davis, ainsi qu'Yves Montand.

Copiée, imitée, parodiée, la star reste encore aujourd'hui une icône du cinéma dont on perce peu à peu les secrets.

En début d'article je parlais de "supercherie" car Hollywood a substitué à l'authentique Marilyn un faux physiquement parfait dont on a fait oublier l'intelligence fine, la sensibilité et la fragilité, que la Monroe tente de restituer dans ses chansons.

C'est probablement son ex mari, écrivain et dramaturge qui lui offrit son dernier rôle, Arthur Miller, qui résume le mieux Marilyn Monroe:

Elle était un poète au coin de la rue essayant de réciter ses vers à une foule qui lui arrachait ses vêtements

Elle en est morte de froid, au cœur et à l'âme.