En 1978 un réalisateur inconnu tourne un film avec des acteurs quasi inconnus issus du café-théâtre (Le Splendid) autour d'une intrigue sans queue (quoique...) ni tête plus mince qu'une feuille de papier à cigarettes et des dialogues "à l'arrache" qui mettraient les néo-wokes en PLS d'indignation.
Contre toute attente et presque contre toute logique, "Les Bronzés" va devenir un film culte.
Multi rediffusé à la télé, objet de soirées spéciales au Grand Rex, "Les Bronzés" sont entrés dans la légende cinématographique.
Ses acteurs sont devenus stars du box office français, certaines répliques sont devenues des gimmicks et un des titres de la B.O. deviendra un incontournable des tubes de l'été, Darla Dirladada.
Ou l'histoire belge d'une chanson grecque...
L'esprit Club Med à la moulinette
C'était l'époque où un nouveau concept émergeait, celui des villages de vacances "tout compris", compromis entre le camping populaire et infrastructures plus haut de gamme. Le Club Méditerranée™ devient un fleuron de l'industrie du tourisme avec ses villages en France puis à l'étranger, où les G.O. (Gentils Organisateurs) veillent à l'amusement et au divertissement des G.M (Gentils Membres).
Gilbert Trigano, patron tout puissant de la marque en France, refusera que le film, satire assumée de ce type de vacances organisées, soit tourné dans un de ses villages en Côte d'Ivoire, comme c'était initialement prévu. Le film sera tourné dans un village de vacances voisin, à Assouindé qui fermera ses portes en 2005.
Darla Dirladada, d'un chant de travail aux congés payés
En générique d'ouverture, Serge Gainsbourg a autorisé l'utilisation de son tube Sea Sex and Sun.
Mais c'est surtout ce titre qui marque les esprits et fait immédiatement penser au film de Patrice Leconte.
Qui dit "village de vacances" dit G.O. pour animer les soirées et "Les Bronzés" n'y échappent pas, au grand dam de Jean-Claude Dusse (Michel Blanc), aussi à l'aise qu'un haltérophile en tutu face à un Luis Rego en jupe verte tandis que Popeye (Thierry Lhermitte) fait une vahiné presque convaincante .
Darlida, une chanson de travail
C'est une destinée un peu inattendue que celle de cette chanson.
Dès
l'Antiquité l'ile de Kalymnos (dans le Dodécanèse) est réputée pour la
qualité de ses éponges végétales que Homère mentionnera dans ses écrits,
réputation qui deviendra mondiale.
Cette pêche est un métier à haut risque pour les pêcheurs qui risquent l'accident de décompression à chaque plongée.
Ce métier, le capitaine Pantelis Ginis le connait bien !
![]() |
Le capitaine Pantelis Genis (assis) et son équipage |
Natif de l'île, chaque jour il embarque sur son bateau avec son équipe de plongeurs.
On est dans les années 50. Le métier est rude et peu lucratif au regard des risques. Alors pour remonter le moral des hommes, il écrit une petite chanson tandis qu'il est à la barre.
Il y évoque le métier, les insulaires, le tout avec humour et un peu de grivoiserie. Pour la mélodie, il se serait inspiré des rythmes des chansons des pêcheurs nord-africains croisés lors de ses campagnes, les mêlant aux sonorités de son pays.
La chanson fait rapidement le tour de l'île et tous les équipages kalymniotes la chantent et de port en port, la chanson fait le tour de la Grèce.
Ce serait en 1965 que le capitaine-compositeur aurait enregistré Dirlantá en grec moderne puis Dirlada, en compagnie de la musicienne Domna Samiou, dans un studio d'Athènes.
En 1969 le célèbre chanteur grec Dionysis Savvopoulos la sort en 45T, la présentant comme une chanson folklorique traditionnelle. Probablement une façon de s'affranchir d'éventuels droits d'auteur...
Pantelis Ginis la trouve saumâtre et intente une action contre Savvopoulos, prouvant qu'il est bien l'auteur-compositeur de Dirlanda. Il ne vivra pas assez vieux pour voir aboutir son action mais c'est sa famille qui touchera les droits d'auteur.
Le disque de Dionysis Savvopoulos connaîtra un succès modeste mais il contribuera probablement à faire connaître la chanson en Europe.
Un succès franco-belge
En France, l'écrivain et parolier Boris Bergman et Jean Musy, compositeur, retravaillent Darlida.
Cette histoire de rupture désormais intitulée Darla Dirladada est proposée à Dalida qui en fait un tube en 1970.
Huit ans plus tard, la bande du Splendid reprend la mélodie en y collant cette fois des paroles loufoques où Assouindé devient "Galaswinda".
Viens nous voir à Galaswinda, darla dirladada
Y a du soleil et des nanas, darla dirladada
On va s'en fourrer jusque-là, darla dirladada
Pousse la banane et mouds l'kawa
Tous les soirs on f'ra la java, darla dirladada
En hurlant "Agadaouba !", darla dirladada (bis)
Cet instant de poésie estivale et décalée aurait pu rester dans le cercle des fans des "Bronzés".
Darla Dirladada l'hymne des draps de plage
Dans les années 90 les Clubs Méditerranée sont toujours là, avec leurs Gentils Organisateurs qui accueillent les Gentils Membres.
Certes, l'esprit a un peu changé depuis le lancement du concept par le Belge Gérard Blitz mais la marque reste le symbole de vacances accessibles à tous. Pour l'anecdote, désormais la marque Club Med appartient à un consortium chinois.
Quatre professionnels belges de la techno et de l'eurodance, Bruno Van Garsse, Freddy Nyiri, Jacky Meurisse, Michel Nachtergaele, se regroupent pour former les "G.O. Cul-ture".
En 1993 ils sortent une version entièrement remixée de la chanson des "Bronzés", avec tous les ingrédients musicaux pour en faire un tube dance.
Le groupe préserve l'esprit "Bronzés" en reprenant les paroles et la chorégraphie.
Si les versions de Dalida et des "Bronzés" s'étaient classées honorablement au box office, la version des G.O Cul-ture va être un carton plein.
Meilleure vente en France, le Darla Dirladada 1993 va squatter le Top 50 pendant 29 semaines.
Dans les media, dans les discothèques; dans les campings ou sur les plages, impossible d'y échapper et aujourd'hui encore c'est un incontournable des soirées vacances.
Des éponges de Kalymnos au tissu éponge de nos serviettes de plage, on a oublié le capitaine Pantelis Ginis.
Près de 70 ans après, sa chanson, écrite pour remonter le moral de ses hommes continue de remonter le moral bien au-delà des côtes grecques.
ah ma bonne dame c était le bon temps... mais où sont passés les temps heureux et insouciants ? je vous le demande... ou alors... c était juste que l on était jeunes et heureux de vivre...gros bisous
RépondreSupprimerMerde ! On se croirait sur Radio Nostalgie ! 😆😆😆
SupprimerNon, nous n'étions pas insouciants, loin de là ! Au contraire, nos générations étaient plus conscientes de la fragilité des choses et surtout nous étions plus conscients du rapport à l'autre. Et avec le meilleur réseau social du monde : l'échange direct.
Aujourd'hui on se regarde le nombril. Du coup on avance sans voir où on met les pieds alors forcément, au bout d'un moment on se prend un mur pleine tronche !
Et ça va faire mal, très mal.
Gros bisous
Coucou toi
RépondreSupprimeroh cette chanson, je la déteste
tellement dansée et entendue
que je ne peux plus l'entendre en peinture lol (oui vu que je ne peux pas la voir)
Elle ne me rappelle pas que des bons souvenirs
bisous ma belle
Elyci
Hello !
SupprimerAh ça, on en a mangé ! Voire soupé !
Le plus intéressant, c'est son origine.
Et puis cette chanson reste un "témoin" d'une époque.
Bisous
Je n'ai jamais vu ce film, je ne sais plus trop pourquoi, je pourrais me rattraper, par contre la chanson je m'en souviens très bien darlda didalada! Le genre de film tranquille pour un vendredi soir sans prise de tête ! Bises, Sylvie
RépondreSupprimerC'est clair que tu ne choperas pas une migraine pour décrypter le scenario ! 😆
SupprimerPar contre, je ne suis pas sûre que tu supportes longtemps le côté potache, et c'est un euphémisme, de ce film.
Par contre, au deuxième degré, c'est le reflet d'une époque qui, après le printemps 68 des parents, rejetaient le conformisme des années Giscard. C'était l'émergence des Coluche, Renaud...
Bisous
Sympa de mettre en avant les origines de cette chanson, en effet ça n'avait rien à voir avec l'esprit club de vacances des années 70, très intéressant ton article et je me coucherai moins bête ce soir, enfin c'est ce qu'on dit 😂
RépondreSupprimermerci pour ton passage,
bisous et bon week-end!
Coucou !
SupprimerJ'adore découvrir ce qui se cache derrière ce que j'écoute, et le partager.
Son origine est effectivement surprenante au vu de ce que symbolise cette chanson de nos jours.
Outre la démarche humaine de ce capitaine, ce qui m'a frappée c'est son sens musical : son refrain était taillé sur mesure pour marquer l'esprit et bien des compositeurs rêvent de trouver ce genre de petite phrase musicale qui traverse le temps.
C'est ce qu'on dit, et c'est pas faux... même si on oublie le lendemain ! 😁
Bisous